Jean David SabanPeintre Graveur
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Quand Saban, peintre, re-visite le paysage - Exposition Lisle sur Tarn

Et si nous imaginions tout d’abord notre artiste en marcheur impénitent, en chasseur d’images photographiques, en dessinateur sur le motif, saisi d’émerveillement face à cette Nature, qui d’aventure fait ici « Impression », empreinte… à investir plus tard dans le travail en atelier, gravure ou peinture selon.

Matières, formes, lumières, compositions, autant d’indices sensibles que ces travaux d’approche, dépouillés de leur effet carte postale, sauront « trans-poser » et « re-figurer » expressivement : par mûrissement, oubli partiel, recouvrement, prélèvement de détails, et stylisation d’ensemble. C’est bien par ces opérations révélatrices que l’œuvre pourra ressourcer - dans l’émotion cette fois - ce lien intime qui attache l’artiste à son sujet, cette fusion pacifiée avec la Création environnante (que l’on réfèrera volontiers, chez Saban, à la pratique du Zen).

Pour avoir fréquenté le désordre créatif de son atelier columérin (photos et croquis en vrac autour de lui, voisinant une armada de pots de couleur et de pinceaux éreintés), pour avoir assisté à son travail de peintre, je puis attester que l’exécution de l’œuvre porte, encore et sans trêve, la marque de cette vivacité première, toute en légèreté, vélocité même, ce qui n’exclut pas l’acharnement à l’ouvrage : l’artiste est à ce stade comme un chef d’orchestre conduisant plusieurs pupitres, menant là plusieurs œuvres de front, animé aussi par cet esprit de recherche qui lui fera déjouer les pièges de l’huile et de l’acrylique, comme ceux de la gravure autrefois.
Remarquons au passage - et pour le plaisir d’une réminiscence de cette Epoque graphique si talentueuse - quelques volées de traits cheminant dans la peinture de tel ou tel tableau d’aujourd’hui, pour lui insuffler une vibration certaine.

Certes, il est plus d’une osmose entre peinture et gravure, toutes expressions qui se peuvent exalter mutuellement avec profit pour une identité artistique enfin réconciliée. Reste à parier Jean David, sur ton retour non exclusif à la gravure, rendu au principe salutaire des vases communicants !

Collines, labours et vignes, salins de Gruissan, stations balnéaires et littoraux sauvages, eaux de Garonne en crue, autant de motifs que viendront relayer des expositions-phares consacrées à des villes emblématiques : de Toulouse ô Toulouse l’Amante fidèle à Venise l’Enchantée fantasque, des grisailles de Paris à l’abstraction contrastée des terrasses de Barcelone, en passant par la luminosité féerique de Marrakech, et tout récemment par la rigide blancheur de Cadaqués ; oui, la peinture de Saban se féconde à l’envi de la singularité de ces sujets citadins… par la touche et la texture, l’atmosphère colorée, l’univers des formes et leur cadrage, l’accueil enfin – modernité oblige, peut-être mâtinée d’humour - d’éléments contemporains (signalisation routière, travaux publics, balustrades protectrices, bornes d’amarrage, ferrailles), traités parfois en premier plan intempestif, échoués là comme un pied de nez à l’ordonnance sévère des monuments patrimoniaux.

D’aucuns diraient que trop de diversification dans les sujets et les manières peut nuire à l’unité stylistique de l’oeuvre, mais gardons-nous de cette critique pour ne retenir que l’élan vital de cette peinture, son urgence à créer dans l’ouverture, son exigence à témoigner pour un être au monde sensualiste… De cet abandon du regard renaîtront alors, pour l’amateur comme pour le profane, tant de paysages, de pays en somme, heureusement re-visités, et marqués d’une « Présence » inédite !

Car l’Art de Jean David Saban reste d’essence « populaire », induisant l’amateur en familiarité avec les lieux évoqués, les parant d’une aménité poétique propre à rendre le Réel plus habitable.
Emportée en exil, chaque toile aimée pourrait bien conjurer l’absence ; chaque gravure choisie, transmise de génération en génération, conserver vive la mémoire des lieux de notre séjour.

Claude Barrère.
Poète et Critique.
Toulouse (janv. 2017)

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